Tous au bouleau !

Une cure pour le printemps

Gilles Duvivier : « Une cure de sève de bouleau une tradition millénaire très présente dans les pays nordiques, de l’Alaska à la Sibérie, qui doit se vivre pour être comprise. »

Gilles Duvivier ouvre la porte d’une cabane en bois de fortune. Il y a ici tout ce qui est nécessaire à une existence débarrassée du superflu : quelques livres bien choisis (Nadejda Mandelstam, Antonin Artaud…), un poêle à bois, une table, deux chaises, un peu de vaisselle. Plus loin, il y a du bois sec pour faire le feu et aussi un autre petit cabanon avec un lit pour une immersion au cœur de la nature.

Un imposant guerrier celte au front proéminent et au look de zadiste, tel est Gilles Duvivier. Son parcours n’est pas banal. Il est celui d’un surdiplômé – philologie romane, philosophie, anthropologie ; polyglotte – en plus du français, il sait l’anglais, le néerlandais, l’hébreu, qu’il sait aussi écrire, le yiddish, l’allemand et le slovène.
Son terrain de jeu ? Une forêt de 9 hectares, du côté de Huy, dont il a fait l’acquisition en 2015. Sur place, on se croirait dans « Walden ou la Vie dans les bois », l’ouvrage culte de Thoreau.

« Le bouleau est un arbre pionnier qui prépare la venue de la forêt »

Comment a-t-il eu l’idée de récolter la sève de bouleau fraîche non pasteurisée ? « Il y a sept-huit ans, j’ai beaucoup souffert, j’étais en lutte avec la maladie de Lyme », explique-t-il. « Je me suis mis en recherche d’un protocole de remèdes naturels cohérent pour me soigner. La sève de bouleau en faisait partie dans la mesure où il me fallait un diurétique puissant pour nettoyer mon corps d’un traitement à base de racine de cardère. »

En janvier, cet amoureux de la vie en plein air anticipe la saison de la sève de bouleau qui s’étend généralement de fin février à début avril. En attendant l’aube du printemps, moment où l’activité végétale reprend, il prépare en solitaire le terrain, dégageant les chemins, réglant les questions logistiques et sélectionnant les arbres sur lesquels il va pratiquer des perforations de 8 mm de large et de 1,5 cm de profondeur au niveau du cambium (l’écorce interne), à environ 1 m au-dessus du sol.

« C’est une tradition millénaire qui découle du mode d’existence d’un arbre pas banal »

Aux environs de mars, il insère des tubes, les mêmes que pour la récolte d’eau d’érable servant à fabriquer le fameux sirop, directement reliés à des poches isothermiques de 2 litres se remplissant le jour et, parfois, la nuit. Une équipe d’une douzaine de personnes, issues du monde du spectacle pour la plupart, assure une logistique en flux tendu pour que la centaine de points de vente désireux de vendre ces bag-in-the-box marqués “Ma Forêt” soient livrés le lendemain de la ponction.

Alors que l’arbre fait circuler environ 200 litres de sève par jour, Gilles Duvivier n’en soutire que de trois à cinq litres quotidiennement. La récolte terminée (environ 10 000 litres par an), le trou est colmaté avec un petit morceau de bois et un pansement d’argile.

« Le bouleau est un arbre pionnier qui prépare la venue de la forêt. Il y a un cycle de vie assez court et se caractérise par sa souplesse. Il est remarquable de voir que contrairement au hêtre, par exemple, les pollens très légers de cet arbre à l’écorce blanche sont emmenés très loin. Il y a un mélange génétique constant. On n’est pas dans la configuration des ormes ou des châtaigniers qui sont fragilisés », assure ce passionné.

Aux sceptiques qui pensent que la sève de bouleau est une eau juste un peu plus riche en minéraux, Gilles Duvivier oppose une conception basée sur l’expérience que confirme une présence dans l’industrie pharmaceutique et cosmétique. « À première vue, la sève ressemble à de l’eau avec du sucre. Je comprends que l’on puise être dubitatif. Il reste qu’entreprise à l’aube du printemps, une cure de 21 jours (un grand verre à jeun le matin), avec ses effets diurétiques, permet d’éliminer les toxines et les restes de l’hiver.

C’est un phénomène, une tradition millénaire très présente dans les pays nordiques, de l’Alaska à la Sibérie, qui doit se vivre pour être comprise et qui découle d’une observation attentive du mode d’existence de cet arbre pas banal », conclut le reconverti.

Envie d’une délicieuse recette avec la sève de bouleau Ma Forêt ?