Effusions chocolatées
Un retour aux sources du cacao
Chukwa
Infusions à base de cosses de fèves de cacao torréfiées
Zaterdagplein 4/3
1000 Brussel
Fast forward. Dix années plus tard, alors qu’elle vit en Afrique du Sud, elle découvre par le plus grand des hasards une savoureuse infusion à base de cosses de cacao. Confrontée à ce goût torréfie rond et réconfortant, la révélation est immédiate. « Ce n’était ni du thé ni du café… et je sentais que c’était bon pour mon corps, j’ai immédiatement cherché à en savoir davantage sur ce produit. »
À 18 ans, Sidonie Descheemaeker (30 ans) se rend en Équateur à la faveur d’un échange culturel. Elle en profite pour visiter plusieurs petites plantations de cacaoyers. Parmi les couleurs et les odeurs de ces havres de paix végétaux, la magie opère à plein régime. « Sans le savoir, c’est comme si une petite graine avait été plantée en moi », explique-t-elle.
« Il faut se rappeler qu’à l’origine, les Mayas dégustaient le cacao sous la forme d’une boisson amère »
Les cosses de cacao ? Pour comprendre, il faut se livrer à une petite anatomie de la baie du cacaoyer que l’on appelle “cabosse”. Chaque cabosse contient 15 à 40 graines, ce sont les “fèves de cacao”. Autour de celles-ci, on trouve un tégument rouge-brun assez résistant, de la pure fibre sans une once de graisse, il s’agit de la cosse que désignées par les termes “coque” ou “écorce”.
De retour en Belgique, Sidonie entame une réflexion plus profonde autour de cette matière première riche en vitamines, antioxydants et nutriments qui, en Belgique, le “pays du chocolat”, termine la plupart du temps sa course au fond d’une… poubelle.
« Les cosses déclinent un large spectre de saveurs lié aux différentes origines géographiques »
Cela cogite d’autant plus que la jeune femme, qui a étudié le droit mais ne s’est pas épanouie au barreau, rêve d’entreprendre pour son propre compte.
« Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire, car il n’était pas normal de consommer le chocolat que d’une seule façon. »
« Il faut se rappeler qu’à l’origine, les Mayas dégustaient le cacao sous la forme d’une boisson amère. » Il était donc logique de rendre hommage à cette civilisation en utilisant “chukwa”, un mot signifiant “chocolat”, pour baptiser ce concept.
« Ce qui est formidable, ajoute-t-elle, c’est qu’il s’agit d’un produit millénaire épousant parfaitement les attentes du goût du jour, comme par exemple le fait qu’il n’y ait pas de caféine. En lieu et place, il y a de la théobromine, une substance qui stimule en douceur, et de l’anandamide qui influence positivement l’humeur. »
En plus du fait de renouer avec un usage oublié, Sidonie se rend compte que les cosses lui offrent la possibilité d’être en accord avec les valeurs qui sont les siennes. « Je ne voulais pas débarquer sur le marché avec quelque chose de nouveau ou importer un objet en plastique depuis la Chine. L’époque n’est plus au superflu. Là, il s’agit de revaloriser une ressource inexploitée qu’il n’est pas nécessaire d’importer puisqu’elle se trouve déjà chez les chocolatiers. En un certain sens, c’est un produit local qui attendait qu’on lui destine un usage. »
Pour ce faire, en mars 2020, Sidonie prend contact avec une sélection de chocolatiers “bean-to -bar”, ceux qui travaillent directement à partir des fèves, ainsi qu’avec des fournisseurs bio pour dessiner les contours des quatre produits composant sa gamme (Original, Coco, Chili et Chai).
Avec pas mal de flair, la trentenaire décide de valoriser, en la mentionnant sur l’emballage l’origine des fèves dont elle utilise les cosses. « Quand je débarque chez un chocolatier, c’est toujours une surprise, car j’ignore d’où viennent les fèves qu’il a travaillées. Cette variété a une incidence sur le résultat final. Pour avoir fait des tests comparatifs, je peux dire que les infusions révèlent un large spectre de saveurs lié aux différentes origines géographiques. En ce moment, je travaille des cosses du Costa-Rica », commente l’intéressée qui assure à la fois la production, le marketing et la commercialisation de sa marque.
La production ? Encore relativement confidentielle, elle s’effectue chaque semaine dans la cuisine de Sidonie qui y transforme les cosses dans de grands blenders. « Je transforme les cosses d’une même origine en une poudre semblable à du café moulu. Cette consistance est celle qui libère le plus de goût. J’essaie d’altérer le moins possible cette matière première unique. C’est également dans la cuisine de mon appartement que je réalise les mélanges avec coco, les piments et les épices chai. »