Crackers
Un biscuit craquant gagné à l’économie circulaire
L’une de ces structures, Beerstorming, un lieu saint-gillois permettant à tout un chacun de brasser sa propre bière, offre un sachet de drêche à Cyril Beneche, du nom de ce résidu d’orge dont les brasseurs se débarrassent après la cuisson de la bière.
« À dire vrai, cela ne m’a pas beaucoup stimulé dans un premier temps. Ce n’est qu’après une soirée entre amis au Moeder Lambic, le fameux bistro bruxellois, que j’ai eu un début de piste. Pour accompagner la dégustation d’une bière, en guise de grignotage, ils ont la bonne idée de servir des grains d’orge. J’ai adoré ce goût de céréales. Je me suis dit que je pourrais peut-être le retrouver dans des biscuits. J’ai d’abord essayé d’incorporer de la bière à la farine. Cela ne fonctionnait pas. Puis, j’ai eu une révélation : pourquoi ne pas utiliser la drêche que l’on m’avait donnée ? »
Tout a commencé par une reconversion. Cyril Beneche, un Français de 34 ans, perd son emploi de géologue minier. Taraudé depuis toujours par les bonnes choses, il décide de suivre une formation de pâtissier. De fil en aiguille, il débarque à Bruxelles où il décide de faire des biscuits, un produit qui a l’avantage de s’accommoder autant du sucre que du sel.
« Le départ a été très empirique, je réinventais la roue. Je me souviens d’une grosse commande pour laquelle j’ai aplati 30 kg de pâte au rouleau », s’amuse le trentenaire en se rappelant la douleur dans les avant-bras. Si l’efficacité n’est pas encore là, l’aventure a le mérite de le mettre en contact avec d’autres acteurs de la scène food bruxelloise. Soit tout un réseau de nouveaux artisans dopés au locavorisme et inspirés par des démarches qui n’ont pas que le seul profit en ligne de mire.
« La drêche a un potentiel nutritionnel incroyable, c’est une sorte de “pain elfique” chargé de protéines. »
Motivé, Cyril multiplie les essais jusqu’à obtenir la recette qui le séduit. Les circonstances vont l’aider à développer cette géniale intuition. « Par chance, j’y ai été mis en contact avec la Brasserie du Renard à Grez-Doiceau. Cela a été une super opportunité, car je me suis vite rendu compte qu’il était difficile de se procurer de la drêche biologique. Eux en avaient à revendre… On a noué une collaboration forte qui se poursuit aujourd’hui encore, même s’il m’arrive parfois de travailler avec la drêche de Cantillon, une brasserie bruxelloise historique. »
« Il nous arrive parfois de travailler avec la drêche de Cantillon, une brasserie bruxelloise historique. »
Porté par ce partenariat inespéré, le néo-artisan imagine une gamme de crackers à la drêche en version nature (“Foxy”), à l’ail (“Fang”), au thym (“Sunny”) et au fenouil (“Annie”). Les intitulés ? Cyril Beneche les puise dans le répertoire musical, une source d’influence majeure pour lui.
En plus de son intérêt gustatif, la drêche fait valoir un autre atout. « Cette matière première est très chargée en fibres et en protéines. Du coup, sur le plan nutritionnel, c’est une aubaine. Un sportif de haut niveau s’en était fait une réserve pour rejoindre la Norvège à vélo. Il en parlait comme d’un “pain elfique” lui permettant de pédaler sans faiblir », se réjouit le fondateur de Mad Lab, désormais associé avec David Moriamé (37 ans).
À côté de cela, la marque aligne également des références de crackers salés et sucrés sans utilisation de drêche. Le fil rouge ? Des goûts marqués et des saveurs identifiables. On en veut pour preuve une petite merveille comme “Red Morning Light”, un biscuit aux saveurs baies roses et orange.
Quand on l’interroge sur le chemin parcouru depuis les débuts, Cyril avoue qu’il n’a pas à rougir. Ce dont il est le plus fier, c’est probablement de redonner vie à une matière première qui finit habituellement sa vie dans un incinérateur.
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