Des sodas bruxellois
Inspirés par l’Amérique latine
Durant le voyage, alors qu’il traverse l’Argentine en bus, au fil de la fameuse route Cuarenta qui traverse le pays du nord au sud, Seppe a l’idée de transposer la formule sous nos latitudes. Le pitch ? Un soda « local, durable et citoyen » en forme d’alternative à l’impérialisme économique des grandes marques internationales.
Pull chamarré, cheveux hirsutes et immense sourire : difficile de résister à la coolitude que dégage Seppe Van Sever (30 ans). Surtout lorsqu’il raconte la naissance d’Atelier Cuarenta : « J’ai fait un voyage de quatre mois en Amérique du Sud. Avec ma copine, nous sommes allés en Argentine, au Brésil, au Chili et au Pérou. Dans ces pays, j’ai été frappé par les jus, les sodas et les cocktails, fabriqués avec des produits naturels, que l’on trouvait à tous les coins de rue. Il y avait par exemple la chérimole dont le goût évoque tout à la fois la mangue, l’ananas et la fraise ».
« Un soda local, durable et citoyen »
De retour en Belgique, le premier confinement laisse à ce jeune homme originaire de Wezembeek-Oppem tout le temps nécessaire pour entreprendre des recherches. « J’ai vu que des démarches similaires existaient à Londres, Paris ou Berlin… mais pas à Bruxelles. » Cette découverte le pousse à imaginer un projet de “microbrasserie à sodas” dans la plus pure veine artisanale. Ce lien à l’univers des bières “craft” est assuré par la couleur brune des bouteilles, soit un chromatisme courant dans le monde brassicole mais rare en matière de boissons gazeuses sans alcool.
« J’ai créé cette boisson pour qu’elle soit bue à la terrasse d’un café »
Pendant plusieurs semaines, Seppe se sert de sa cuisine comme d’un laboratoire. Très vite, il met au point une recette simple et efficace s’appuyant sur quatre ingrédients. « J’ai tenté des mélanges complexes avec de nombreuses épices pour me rendre compte à la fin que le procédé le plus élémentaire était le meilleur. L’important était d’arriver à obtenir un bel équilibre », commente cet ingénieur commercial qui travaille par ailleurs pour un des gros fournisseurs d’énergie du pays.
Équilibre ? C’est le mot-clé pour caractériser ces produits qui passent haut la main l’épreuve de la dégustation en enchantant les papilles. La touche qui achève de séduire ? Les belles étiquettes très colorées, pour rappeler l’Amérique latine, qui sont signées par l’agence graphique Wuce Brillis.
Vu le caractère limité du nombre d’ingrédients, Seppe Van Sever met un point d’honneur à travailler de vrais produits, c’est-à-dire partir, par exemple, un vrai citron et pas un jus déjà pressé. Jusqu’ici, la gamme compte deux références : “BSL” pour “Basilic” et “GNGR” pour “Gingembre”.
La base des sodas consiste en un même mélange – eau légèrement pétillante, citron bio déniché au marché matinal et sucre de canne Fairtrade venu du Costa Rica – dont les proportions varient en fonction des recettes. Pour la version “BSL”, c’est du basilic poussant sur le toit de la ferme urbaine BIGH aux Abattoirs d’Anderlecht qui est ajouté. Les flacons de “GNGR”, quant à eux, sont boostés avec un gingembre chinois, moins courant et surtout moins piquant que celui qui nous arrive du Pérou.
Vu qu’il n’y a aucun colorant ou conservateur dans les sodas de Seppe, ceux-ci sont pasteurisés (lire : chauffés à 85 °C par le biais d’un autoclave qui les stabilise et leur assure une conservation plus longue).
À l’heure d’écrire ces lignes, Atelier Cuarenta était sur le point de déménager. « C’est mon dernier batch de 200 litres à la maison, explique Seppe. Je m’installe dans un atelier sur le site des Abattoirs d’Anderlecht pour être à la fois près du lieu où s’effectue la pasteurisation et aussi de celui où pousse le basilic que j’utilise. Je ne serai pas loin non plus de Dioxyde de Gambettes, mon partenaire qui organise les livraisons à vélo dans Bruxelles. »
Le rêve de Seppe ? « J’ai créé cette boisson pour qu’elle soit bue à la terrasse d’un café. Un plaisir entre amis. Vu la situation actuelle, je n’ai pas encore pu démarcher l’horeca, mais j’espère que le secteur va s’enthousiasmer pour mon produit ».
Il est à noter que ce tout frais trentenaire annonce d’ores et déjà des flacons saisonniers, comme une nouvelle bouteille à base rhubarbe. Hâte de siroter cette nouveauté.